s.

saint, sainteté, sanctification

Dans l’Ancien Testament, les mots saint et sainteté correspondent à divers termes hébreux et araméens de la racine qdsh, commune à plusieurs langues sémitiques, que la présente traduction rend aussi, souvent, par l’adjectif sacréet par le verbe consacrer. Sacré et saint dérivent, en français, de deux mots latins apparentés; l’usage les a distingués, de sorte que le mot « saint » a habituellement une connotation morale, et qu’on parle plus volontiers d’objets ou de lieux « sacrés ».

 

L’étymologie de qdshreste discutée: on y a longtemps vu l’idée de mise à partou de séparation (entre le sacréet le profane, celui-ci étant désigné par la racine hll, comme en 1S 21.5s; Ez 22.26; 42.20; 44.23). Puis, sans doute en partie par réaction, on a davantage mis en valeur une composante de communicationou de participation: le contact du sacré consacre ou, si l’on préfère, le saint sanctifie (Ez 44.19; 46.20; cf. Ag 2.12; voir aussi Es 65.5 ; Mt 23.17,19). Le sacré ou la saintetésont souvent associés à la notion de pureté* (racine thr, cf. 2S 11.4n), sans toutefois se confondre avec elle. Il est clair en tout cas que la racine qdsh évoque le domaine propre et réservé du divin, avec tout ce qui s’y rattache; même les hiérodules attachés à certains sanctuaires sont appelés qedéshim ou qedéshoth, [prostitué(e)s] sacré(e)s (cf. Gn 38.21ns; Dt 23.18n; 1R 14.24; 15.12; 22.47; 2R 23.7; Os 4.14; cf. Mi 1.7). Dans la Bible, bien sûr, le sacré s’identifie dans la grande majorité des cas au domaine de YHWH (le Seigneur).

 

Dieu est donc saint, par excellence et par définition (Ex 15.11; Lv 19.2; 20.26; 21.8; 1S 2.2; 6.19s; Es 5.16; 6.3; 8.13; 40.25; 57.15; Ez 39.7; Os 11.9; Am 4.2; Ha 1.12; 3.3; Ps 22.4; 77.14; 99.3,5,9; Jb 6.10; cf. Jn 17.11; 1P 1.15; Ap 4.8; 6.10). Du début à la fin, le livre d’Esaïe l’appelle le Saint d’Israël, formule dans laquelle le mot Saintest l’équivalent de « Dieu » (Es 1.4; 5.24; 10.17,20 etc.; 12.6; 17.7; 29.19; 41.14,16,20 etc.; 55.5; 60.9,14; aussi en Jr 50.29; 51.5; Ps 71.22; 78.41; 89.19). Son nom*, qui s’identifie dans une certaine mesure à son être même, est sacré plus que toute autre chose (Lv 20.3; 22.2; Ez 36.20ss; Am 2.7; Ps 30.5; 33.21; 97.12; 99.3n; 103.1; 111.9; 1Ch 16.10,35 ; cf. Mt 6.9//; Lc 1.49). Est également sacré ou « saint » tout ce qui représente son actiondans le monde: son souffle ou son Esprit* (Es 63.10s,14; Ps 51.13, d’où l’expression Esprit saint qui connaîtra un développement nouveau dans le Nouveau Testament), son bras (Es 52.10; Ps 98.1) ou sa parole (Ps 105.42; cf. Ps 89.36; Dn 11.28,30 parle aussi d’alliance sacrée, cf. Lc 1.72; notons que c’est seulement en 1 Maccabées*12.9 qu’il sera question de « livres saints », cf. Rm 1.2; 7.12).

 

La sainteté de Dieu est appelée à être reconnue des hommes (Es 8.13; 29.23): il intervient lui-même pour montrersa sainteté ou celle de son nom, et ses fidèles aussi peuvent contribuer à la manifestation de sa sainteté; on retrouve là les divers sens regroupés traditionnellement autour du verbe « sanctifier » (Lv 10.3; 22.32; Nb 20.13; Es 5.16; Ez 20.41; 28.22,25; 36.23; 38.16,23; 39.27; cf. Mt 6.9//; noter encore l’expression liturgique traduite par quand éclate sa sainteté, Ps 29.2netc.). La notion est ici très proche de celle de gloire*, qui lui est associée en Es 6 et en Ez 28.22 par exemple.

 

Les choses qui appartiennent en propre au divin ou qui lui sont offertes sont sacrées ou consacrées (Dt 12.26; 26.13; cf. Jg 17.3). En Israël, c’est tout particulièrement le cas de la maison de Dieu, le temple*de Jérusalem (Es 60.13; 64.10; Ha 2.20; Za 2.17; Ps 5.8; 79.1; 138.2; 1Ch 29.3; cf. Ex 29.43), d’où son nom de sanctuaire (qodesh, miqdash, toujours de la racine qdsh; cf. Ez 5.11; 8.6; 9.6; 23.38s; 24.21; 25.3; 37.27s; 42.13; 43.4-7; 44.19; voir aussi Dn 8.11,13s; 9.17,24ss; Mt 23.17; 24.15; Ep 2.21). Sont du même coup déclarées sacrésles diverses parties du temple, son mobilier (Lv 6.9,19ss; Es 62.9; Ez 42.13; 46.19) et les offrandes qui y sont faites (Lv 3.11; 22.12; Dt 26.13; 1S 21.5ss; Jr 11.15; cf. 2S 8.11; voir aussi Mt 23.16ss; Rm 12.1). Dans le plan du sanctuaire comme dans ses ustensiles et ses fonctions, on distingue entre sacré et très sacré (hébreuqodesh [ha-]qodashim, traductions traditionnelles « saint des saints » ou « sacro-saint », Ex 26.33s; 29.37n; Nb 18.10n; Ez 41.4; voir aussi Ps 28.2n).

 

Le lieu du sanctuaire est également sacré. C’est le cas de la montagneou colline du temple (Es 11.9; 56.7; 57.13; 65.11,25; So 3.11; Za 8.3; cf. Jr 31.22; 2P 1.18), et plus largement de la ville même de Jérusalem (Dn 9.24; cf. Es 48.2; 52.1; Jr 31.40; Né 11.1,18; Mt 4.5; 27.53; Ap 11.2). Plus rarement, d’autres lieux sont dits sacrés (le Sinaï en Ex 3.5; Ac 7.33), dans certains cas probablement en rapport avec d’autres sanctuaires (ainsi le Guilgal de Jos 5.15; voir aussi Jos 24.26; Am 7.9,13). Exceptionnellement, la même qualification peut être attribuée à tout le pays d’Israël (Za 2.16n, d’où nous vient l’expression « terre sainte »). Certains temps marqués pour le culte peuvent encore être déclarés sacrés: c’est en particulier le cas du sabbat* (Gn 2.3; Ex 16.23; Es 58.13; Jr 17.22,24,27; Né 9.14; 10.32).

 

D’une façon plus surprenante pour les modernes, la guerre est généralement une activité « sacrée », sans qu’on puisse distinguer entre guerres « saintes » et « profanes ». Ainsi la préparation de la guerre est-elle une « consécration », qui s’accompagne de toute évidence de rites religieux (Jr 6.4; 22.7; Mi 3.5; cf. Es 13.3; Jr 12.3; 51.27s). Le camp (mot qui peut être compris au sens d’armée) d’Israël est saint ou consacré (Dt 23.15, cf. v. 11). C’est sans aucun doute à ce caractère sacré de la guerre qu’il faut rattacher les consignes d’abstinence sexuelleimposées aux guerriers (1S 21.6; 2S 11.11) et la pratique de l’anathème (racine hrm, sans doute originellement très proche de qdshquant au sens, cf. Lv 27.28; Ez 44.29, mais qui s’est spécialisée en hébreu biblique dans les contextes de massacre ou de destruction; Dt 2.34n; Jos 6.18s; noter les emplois analogues de qdsh en Jr 12.3; So 1.7).

 

Les personnes qui appartiennent spécialement à Dieu sont dites saintes ou consacrées. Il en va ainsi, notamment, des premiers-nés (Ex 13.2), des prêtres(Ex 28.36; Lv 21.6s; Nb 16.5,7; 1S 7.1; Ps 106.16) ou des prophètes(2R 4.9; Jr 1.5; cf. Mc 6.20), mais aussi, dans une perspective plus large, de tout Israël considéré comme peuple de YHWH (cf. Ex 19.6; Lv 11.44s; Nb 15.40; Dt 7.6; 14.2,21; 23.15; 26.19; 28.9; Es 4.3; 62.12; 63.18; Jr 2.3; Ez 20.12; 37.28; Dn 12.7; cf. 1P 1.16; 2.9).

 

En règle générale, toutefois, ceux qu’on appelle les saints (Os 12.1; Ps 89.6,8; Jb 5.1n; 15.15; Pr 9.10n; 30.3n) sont plutôt des êtres divins, dieux(également nommés fils* de Dieu, fils des dieux,ou armée du ciel) ou anges* (Dn 4.10,14,20; 8.13; cf. Mc 8.38; Lc 9.26; Ap 14.10; comparer 1Th 3.13 avec 2Th 1.7; voir aussi Jd 14; Ap 18.20). Mais il y a des exceptions: en Ps 34.10 et en Dn 7.18,22,25,27; 8.24 il semble bien être question d’hommes, les fidèles de YHWH.

 

Le contact avec le sacré requiert une consécration (ou « sanctification ») particulière (Ex 19.10-15, cf. v. 22s; Nb 11.18; Jos 3.5; 7.13; 1S 7.1; 16.5; Jb 1.5; cf. Es 66.17; Ez 20.12; 37.28), qui inclut sans s’y restreindre la purification* de l’impureté (2S 11.4n) et l’expiation* du péché* (cf. Es 6.3,5,7). Faute de quoi il y a profanation (hll, terme particulièrement fréquent chez Ezéchiel, 7.21ss; 13.19; 20.9,13ss,21ss,39; 22.8; 23.38s; 24.21; 25.3; 28.16ss; 36.20ss; 39.7; cf. So 3.4), souillure (tm’, rendre impur; Ez 43.7) ou sacrilège (m‘l, Lv 5.15n,21; Nb 5.6n,12,31; en rapport avec l’anathème, hrm, en Jos 7.1 etc.). Parfois le profanateur est automatiquement frappé de mort (cf. Lv 15.31; 1S 6.19s) ou d’un autre châtiment (cf. 2Ch 26.16ss), quand son acte n’entraîne pas une malédiction collective (cf. Jos 7). Le cas où le contact de l’impur et du sacré n’entraîne aucune conséquence funeste constitue une exception particulièrement significative (2Ch 30.18ss). Le châtiment lui-même peut être conçu à la manière d’une « consécration », pour autant que le sacrése communiqueen « consacrant » ce qui le touche. Ainsi Akân, en s’appropriant ce qui est frappé d’anathème (les objets consacrés à Dieu, qui auraient dû lui être offerts par une destruction, cf. Mi 4.13) rend son peuple anathème et devient lui-même anathème(il est lui-même « consacré » pour sa perte; Jos 6.17ss; 7). On ne s’étonnera pas que la notion de sacré évoque naturellement celle de crainte*. A l’opposé, la fin du livre de Zacharie envisage l’universalisation du sacré — qui revient en pratique à l’abolition de la distinction entre sacré et profane(14.20s).

 

L’usage de la racine qdsh comporte quelquefois une connotation morale. C’est particulièrement le cas chez les prophètes (Am 2.7; cf. Ha 1.12s), mais pas exclusivement. Du point de vue des prêtres aussi, ceux qui sont consacrés, qui relèvent à un titre quelconque du domaine du sacré (ce qui est au sens le plus large le cas de tous les Israélites, considérés comme membres du peuple de Dieu), doivent se comporter en conséquence, c’est-à-dire être saints. Il s’agit pour eux de se conformer à des normesqui, selon les textes, peuvent nous apparaître tantôt rituelles, tantôt éthiques. On notera combien les deux aspects sont mêlés dans les lois rattachées à la « sainteté » en Lv 19 (voir aussi Ex 22.30 ; Lv 11.44s; 20.3,7s,26; 21.8,23; 22.9,16,32).

 

Dans le Nouveau Testament, les termes saints et sainteté correspondent le plus souvent au grec hagios et à ses dérivés, qui traduisent de façon privilégiée les mots de la famille qdsh dans la Septante(LXX*). Celle-ci, en effet, évite le terme religieux hiéros, trop marqué sans doute par la religion et la mythologie grecques (le Nouveau Testament l’emploie, au neutre [hiéron], pour désigner le temple* de Jérusalem, ainsi que dans l’expression les Ecrits sacrés en 2Tm 3.15; en outre c’est un terme de la même famille, hiéreus, qui est traduit par prêtre*). A hagios est apparenté l’adjectif hagnos et ses dérivés, qui évoquent la pureté* requise pour le culte.

 

A côté de nombreux emplois analogues à ceux de l’Ancien Testament, dont quelques exemples ont été signalés plus haut, le Nouveau Testament se distingue en attribuant à Jésus-Christ non seulement la sainteté d’un serviteur de Dieu (Ac 3.14s; 4.27,30), mais la sainteté même de Dieu (l’affirmation est dans la bouche des démons, les esprits impurs, Mc 1.24//, comme des disciples Jn 6.69; cf. Lc 1.35; 1Jn 2.20; Ap 3.7). Corrélativement il le déclare sans péché* (Jn 8.46; Hé 7.26ss; 1Jn 3.5). Jésus est par excellence consacré ou « sanctifié » par Dieu (Jn 10.36; il se consacre lui-même selon 17.19).

 

D’une façon beaucoup plus systématique que dans l’Ancien Testament, et comme déjà dans le livre de la Sagesse* et à Qumrân*, la sainteté qualifie l’Esprit* de Dieu (Rm 1.4n), qui est aussi celui de Jésus (comparer Rm 8.11,14 avec Ga 4.6) et des siens (cf. Jn 15.26; 19.30; 20.22s; Ac 2.4,38). Cet Esprit est appelé saint dans tout le Nouveau Testament (Mt 1.18,20; Mc 1.8//; 3.29//; 12.36), surtout chez Luc (1.15; 2.26; 3.22; 10.21; 11.13; 12.10ss etc.; Ac 1.2,8; 2.33; 4.25,31 etc.).

 

La sainteté du Christ se communique à ses disciples, qu’elle « sanctifie » ou consacre (Jn 17.17; Ac 20.32; 26.18; 1Co 1.30; 3.16s; 6.11; 7.40; Ep 2.21; 5.26; Hé 2.11; 10.10,29; 13.12; 1Jn 2.20; cf. 1P 1.15s; 2.9; on notera que la notion est, plus étroitement encore que dans l’Ancien Testament, associée à celle de pureté*). Tous les chrétiens, indépendamment de leur vertu ou de leurs faiblesses morales, sont appelés des saints (Rm 1.7n; 1Co 1.2; 14.33; Hé 13.24), en ce sens qu’ils sont consacrés ou rendus sacrés par le fait même qu’ils appartiennent au Christ (on note exceptionnellement des emplois plus larges, en Mt 27.52s pour les « saints » de la période préchrétienne, en Mc 6.20 pour Jean le Baptiseur). L’appellation les saintsdésigne quelquefois plus particulièrement les judéo-chrétiens qui se rattachent à Jérusalem (Rm 15.25s; 1Co 16.1,15; 2Co 8.4; cf. Ac 9.13,32,41; 26.10).

 

Pourtant les premiers chrétiens sont également appelés, sur un ton d’interpellation à la fois éthique et spirituelle qui rappelle celui des prophètes, à une saintetéqu’on nomme aussi « sanctification » ou consécration(hagiasmos, Hé 12.14; cf. Rm 6.19,22; 12.1; 2Co 7.1; 1Th 3.13; 4.3s,7; 1P 1.15s; 2P 3.11s; Ap 22.11). Cette sanctification en devenir est également donnée comme l’œuvre de Dieu (1Th 5.23; cf. Ep 5.26n).

 

Dans le Nouveau Testament, les mots saint et sainteté correspondent aussi, plus rarement, à l’adjectif hosios et à ses dérivés. Cette famille de termes, valorisée dans le discours de la morale hellénistique, a un contenu surtout éthique. D’abord utilisé en grec classique pour décrire la vertu des dieux (comme dikaïos, juste, représentait celle des hommes), hosiosévoque plutôt dans le Nouveau Testament la sainteté moralede l’homme au regard de Dieu (il est ainsi apparenté à la piété). Dans la Septanteil correspond le plus souvent à l’hébreu hasid (fidèle), qui vient du mot hésed habituellement traduit par fidélité (voir grâce*). Dans le Nouveau Testament, cette sainteté est exceptionnellement attribuée à Dieu(Ap 15.4; 16.5) ou au Christ(Hé 7.26). Dans les Actes (2.27; 13.34s) celui-ci est le Saint par excellence (ho hosios, comme en Ps 16.10 LXX pour l’hébreu hasid, le fidèle), celui dont « les choses saintes » ou « la sainteté » (ta hosia, comme en Es 55.3 LXX pour le pluriel de hésed, fidélité) sont transférées à une autre génération selon 13.34ss.Cette sainteté-là est surtout un idéal moral proposé aux chrétiens (Lc 1.75; Ep 4.24; 1Th 2.10; 1Tm 2.8; Tt 1.8). Son contraire anosios est traduit par sacrilège en 1Tm 1.9; 2Tm 3.2.

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