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prêtre

Attesté plus de 900 fois dans la littérature biblique, le mot prêtre désigne toujours un personnage en relation avec le culte*. On ne lui connaît pas de féminin dans la Bible. L’étymologie du terme hébreu kohenet de son équivalent araméenkahenreste discutée. Le prêtre est-il à l’origine celui qui « est installé » pour officier, celui qui « se prosterne » devant la divinité pour lui rendre hommage, ou bien celui qui, par son sacerdoce, « rend prospère, florissante », la communauté qu’il sert? Les langues voisines, phénicienne et ougaritique, appuieraient plutôt cette dernière option. Parfois les prêtres de cultes illégitimes sont désignés dans l'Ancien Testament par un autre mot (komer), sans doute emprunté à l’ancien araméen, que la présente version rend par desservants (2R 23.5; Os 10.5n) et auquel certains prêtent une nuance péjorative (« prêtraille »?). Cependant kohen aussi peut être employé dans des contextes comparables (1S 5.5; 1R 12.32; 2R 10.19; 11.18; Jr 48.7; en So 1.4n kohensemble expliquer le terme moins connu komer).

 

En tout état de cause, aussi loin qu’on remonte, la fonction du prêtre, médiateur entre les hommes et les dieux, est bien connue dans tout l’Orient ancien (Gn 41.45; Ex 3.1; cf. Ex 19.22; 28.35,43; Lv 21.17; Nb 18.7; 1S 2.28). Comme leurs confrères des autres nations, les premiers prêtres en milieu israélite sont essentiellement des gardiens de sanctuaire (cf. Jg 17.10ss; 18.30; 1S 2; 21), éventuellement des devins (cf. Gn 25.22), mais pas des « sacrificateurs »: ils peuvent certes sacrifier, mais comme tout un chacun et donc sans qu’il s’agisse d’un privilège spécialement attaché à leur charge.

 

Les récits relatifs à la période des patriarches et à celle des Juges ne font généralement pas intervenir de prêtres dans l’exercice du culte, pas plus qu’ils ne sont attentifs à confiner le service de Dieu dans un espace sacré. On érige librement des autels là où se trouve le clan. Tout chef de famille est habilité à le faire. Ainsi Abraham (Gn 22.9; 31.54; 46.1), Gédéon (Jg 6.25s), Elqana (1S 1—2) et bien d'autres. En 2S 8.18n la fonction sacerdotale semble être encore attribuée aux fils du roi David. En 2Ch 26.18, par contre, le rôle du roi est bien distingué de celui du prêtre.

 

Traditionnellement, l’une des principales fonctions des prêtres consistait à rendre l’oracle en consultant la divinité. Il s’agissait souvent d’oracles politiques destinés au prince, notamment pour la conduite de la guerre (cf. Jg 18.5; 1S 23.2; 30.7s). Selon Lv 8.8; Nb 27.21, on avait recours au pectoralfixé sur l’éphod du grand prêtre, pectoral qui, d’après Ex 28.11ss, était une poche carrée renfermant l’ourim et le toummim (Ex 28.30n). Il ne semble pas que cette pratique ait subsisté au-delà de l’exil (cf. Esd 2.63//).

 

Dans la ligne de leur fonction d’oracle, les prêtres étaient appelés à dire le droit en tant qu’interprètes attitrés de la Torah (voir loi*); ce type d’enseignement constituait une part importante de leur tâche (Dt 17.9ss; cf. 21.5; 33.8s,10n; Ez 44.23; Mi 3.11n; Ag 2.11nss; Ml 2.6s; voir aussi Dt 31.9; Jr 2.8; Os 4.4ss). Mais ils ont fini par être distancés, au moins en ce qui concerne l’explication et l’application de la loi dans les domaines civil et domestique, par la corporation des scribes*, dont l’influence est allée grandissant à partir de la guerre d’indépendance maccabéenne*.

 

Même lorsque les fonctions d’interprétation et d’oracle passèrent à l’arrière-plan, le pouvoir des prêtres resta considérable. Ceux-ci conservaient l’exclusivité de tout ce qui relevait du temple* de Jérusalem, point de passage obligé entre Dieu et les fidèles, surtout depuis que la réforme de Josias avait recentré sur cet unique lieu de culte la totalité des sacrifices légitimes (2R 22—23; cf. Dt 12).

 

Le pouvoir des prêtres était défini et garanti par la loi mosaïque contenue dans le Pentateuque, dont l’autorité — qui fondait aussi le pouvoir des scribes — était absolue depuis l’époque d’Esdras et de Néhémie. De ce fait ils intervenaient, et eux seuls, dans les cas que la loi leur réservait explicitement (p. ex. pour le diagnostic de la « lèpre », Lv 13.2nss; pour l’évaluation des réparations et compensations relevant du droit sacré, Lv 27; pour l’ordalie en cas de soupçon d’adultère, Nb 5.11ss). D’une manière plus large, c’est à eux qu’incombait au premier chef la distinction entre le sacré et le profane (voir saint*, sainteté, sanctification), entre l’impur et le pur* (Lv 10.10; Ez 22.26; 44.23).

 

C’est à l’époque du second temple*, à partir de l’époque perse, que l’organisationde la classe sacerdotale a atteint sa complexité maximale. En combinant les données apportées par le texte biblique et le témoignage des écrits rabbiniques, on peut dresser un tableau sans doute assez complet des conditions requises, des fonctions et des prérogatives des prêtres.

 

Au sommet de la hiérarchie sacerdotale se trouve le grand prêtre. Il est différemment désigné dans les textes (le prêtre tout court en 1R 4.2; 2R 11.9; 12.8; 16.10; 22.10ss; le prêtre en chef en 2R 25.18; 2Ch 19.11; 26.20; 31.10; le grand prêtre en Ag 1.1,12,14; 2.2,4; Za 3.1,8; 6.11; Né 3.1,20; 13.28; chef de la maison de Dieu en Né 11.11; 1Ch 9.11; 2Ch 31.13; et peut-être prince en Dn 9.25n; 11.22). Son entrée en fonction fait l’objet de solennités qui durent sept jours (Ex 29.35; Lv 8.33). Il y reçoit les instruments de son ministère et se voit conférer l'onction*comme les rois (Ex 29.7,29; Lv 8.12; d’où un autre titre encore pour le grand prêtre, le prêtre qui a reçu l’onction,Lv 4.3,5,16; 6.15; 16.32; 21.10,12; Dn 9.25n,26n; 1Ch 29.22; cf. Za 4.14n). Mais les textes attribuent également une onction aux autres prêtres (Ex 28.40s; 29.7ss; 30.30; 40.12ss; Lv 8.30; 10.7; Nb 3.3).

 

Deux figures dominent l’arrière-plan historique de l’office de grand prêtre. Abiatharet Tsadoqsont en effet liés à l'histoire de la mise en place du sacerdoce à Jérusalem par David, puis par Salomon. Abiathar avait été, presque tout au long du règne de David, un serviteur dévoué de son roi. Las, quand on estima David trop âgé pour conduire les affaires, Abiathar se prêta au jeu d'Adonias qui tenta de s'emparer du trône de David par surprise. Mais le complot fut déjoué et Salomon reçut l'onction des mains de Tsadoq, l'autre grand prêtre à la cour de David. Salomon écarta Abiathar de Jérusalem, et dès lors ce fut Tsadoq, puis sa lignée, qui occupa ce poste au temple de Jérusalem (1R 1—2; l’éviction d’Abiathar fait écho au châtiment de son ancêtre Eli, 1S 3—4, et au choix d’Eléazar, Nb 20.25ss, et de son fils Phinéas, 25.7ss, de préférence à Itamar et à ses descendants). La prééminence de Tsadoq est généralement marquée dans les textes par la citation de son nom en premier lieu: on écrit Tsadoq et Abiathar. Le nom des sadducéens*, cette aristocratie sacerdotale qui aura la haute main sur le temple aux jours de Jésus-Christ, se réfère encore à cet ancêtre fameux.

 

A l’époque tardive, nul ne pouvait devenir grand prêtre s’il n’avait d’abord été sagân, c’est-à-dire adjoint (ou vicaire général) du grand prêtre en exercice (cf. le prêtre en secondde 2R 25.18; voir aussi Jr 29.26), qu'il remplaçait d’ailleurs dans les cérémonies en cas d’empêchement. De tradition, le sanhédrin, c'est-à-dire le conseil suprême de la nation, était présidé par le grand prêtre (voir l’encadré « Le grand sanhédrin de Jérusalem », p. 1312).

 

A partir des Séleucides (voir Maccabées*, Hasmonéens), la nominationou la dépositiondes grands prêtres est devenue le fait du prince étranger. Cette pratique s'explique fort bien en raison de la position quasi royale qu’occupait le grand prêtre depuis le retour de l’exil. Les noms et les durées de règnes de cinquante grands prêtres nous sont connus pour la période qui s'étend du retour de Babylone des exilés (Né 12.10ss) aux jours de la guerre juive de 66-70 apr. J.-C.

 

Aux termes de la loi, seuls les fils d’Aaron, c’est-à-dire les prêtres de lignage reconnu, et non pas les simples lévites*, étaient habilités à rendre le culte sacrificiel (cf. Ex 28—29; Lv 8—10; Nb 16—18; Ez 40.46; 43.19; 44.6-31; 48.11). L’appartenance à ce groupe étant posée comme héréditaire, la caste sacerdotale constituait une caste fermée de type aristocratique. L’historien juif Flavius Josèphe* fait mention d’archives nationales, où il retrouva sa propre ascendance sacerdotale, si l’on en croit cette affirmation: « Ma famille n’est pas sans noblesse, puisqu’elle est issue de prêtres. » On sait qu’au retour de l’exil les prêtres durent produire leurs généalogies, faute de quoi ils se voyaient exclus du sacerdoce (Esd 2.61-63 // Né 7.63-65). Pour préserver la pureté de ce lignage, le mariage des prêtres devait répondre à des règles très strictes: ils ne pouvaient épouser qu’une vierge ou éventuellement une veuve (Lv 21.7s). Chez les grands prêtres, les règles étaient encore plus strictes: ils ne pouvaient prendre pour épouse qu’une vierge, elle-même fille de prêtre (Lv 21.13s).

 

Les prêtres devaient évidemment correspondre à de nombreuses autres règles de pureté*, excluant toute impureté provisoire (Lv 21.1ss; cf. Ex 30.17ss) mais aussi tout défaut permanent (Lv 21.17ss). Les vêtements sacerdotaux, portés dans le cadre du culte, ont sans doute varié selon les époques (Ex 28//; cf. 1S 2.18).

 

Le service des prêtres était régi par une organisation très stricte, nécessaire du fait du grand nombre de prêtres rendus disponibles avec la réforme de Josias. L’office du sabbat* est effectué à tour de rôle par les 24 classesde prêtres suivant une ordonnance attribuée à David lui-même (1Ch 24.7ss; 2Ch 23.18 ; cf. Lc 1.5,8). Chaque classe officie pendant une semaine, à peu près deux fois par an, et la relève a lieu le jour du sabbat, après le sacrifice du matin (cf. Ex 29.39; 2Ch 23.4).

 

Les fonctions les plus connues du prêtre sont celles qui ont trait aux offrandes. Celles-ci comportent des offrandes végétales et des sacrifices sanglants, généralement combinés entre eux (voir « Les animaux offerts en sacrifice », p. {000Xsacrif}). En tout cas, les fonctions du prêtre ne se réduisent pas au simple rôle de boucher que leur conférerait le titre de « sacrificateur », dans son acception d'aujourd'hui — les données bibliques ne permettent d’ailleurs pas toujours de savoir qui, du lévite ou du prêtre, immolait effectivement la victime.

 

En tout premier rang vient l’office public du sacrifice constant (en hébreu tamid, Ex 29.38-42; Nb 28.3-8); il s’agit d’une coutume très ancienne, mais elle a évolué dans le temps. Le coût en incombait autrefois au monarque, mais à partir de l’exil c’est le peuple qui assume cette charge. Selon les prescriptions de la Torah, deux agneaux purs sont offerts chaque jour: un le matin et l’autre à la tombée du soir,sans doute pendant le court moment de la journée où le soleil est déjà couché, mais où il fait encore clair (Ex 12.6n). A l’époque du roi Achaz, il y avait holocauste le matin, mais seulement offrande végétale le soir (2R 16.15). En même temps, mais avec des ingrédients différents chaque jour, le grand prêtre offrait des galettes de farine et d'huile cuites à la poêle (mahabat 1Ch 23.29) qui, brisées en menus morceaux et arrosées d'huile, étaient ajoutées à l'holocauste. Il accomplissait cette offrande pour lui-même et sur ses fonds privés (cf. Lv 6.12-16).

 

Le service de l’autel comportait:

 

1) les offrandes entièrement brûlées, ou holocaustes (Lv 1 ; 6; voir 1.3n);

2) les sacrifices pour le péché* (faute à l’égard de Dieu, Lv 4.1+ss) et les sacrifices de réparation (faute à l’égard de Dieu ou du prochain, Lv 5.6n,14ss) où seule la graisse est brûlée, tandis que la viande revient aux prêtres;

3) les sacrifices de paix où la graisse est brûlée, mais où la viande revient au commanditaire du sacrifice, pour un joyeux repas de fête (Lv 3.1nss ; 7.11ss; cf. 1S 2.12ss).

 

L’offrande perpétuelle de l'encens sur l’autel d'acacia recouvert de plaques d'or est placée sous la responsabilité des prêtres qui, matin et soir, y font brûler une composition spéciale prescrite par la loi rituelle (Ex 30.1-9). C’est là aussi que se réalise, au jour de l’Expiation*, le rite expiatoire de l’aspersion du sang sur les cornes de l’autel. Ce rite annuel est accompli par le grand prêtre (Lv 16; cf. Ex 30.10). Les offrandes, avec les dîmes, les prémices, et le prix du rachat des premiers-nésconstituaient l’essentiel du revenudes prêtres (Ex 22.29; Nb 18; Dt 14.22ss; 26). En dehors des offrandes proprement dites, la sonnerie des deux trompettes d’argentdevait expressément être exécutée par des prêtres, les autres instruments liturgiques étant joués par des lévites (Nb 10.1-2,8,10; 2Ch 29.26-28). Le soin rituel du porte-lampes(la menora) qui doit rester perpétuellement allumé — même s’il n’y a pas unanimité des textes et des auteurs anciens sur le nombre des lampes à maintenir allumées — incombe lui aussi aux prêtres (Ex 27.20s; 30.7; Lv 24.2; Nb 8.1-4; 2Ch 13.11). Il en allait de même pour le renouvellement à chaque sabbat des pains offerts:douze galettes spécialement cuites pour être le signe d’alliance perpétuelle (Lv 24.7-9). La bénédiction* prononcée sur les fidèles au nom* de YHWH est également une prérogative sacerdotale (Dt 10.8; 21.5; 1Ch 23.13; cf. Nb 6.22ss). C'étaient des prêtres aussi qui étaient administrateurs du Trésor(cf. Mc 12.41,43; Lc 21.1; Jn 8.20).

 

Les termes grecs hiéreus (= prêtre) etarchiéreus (= grand prêtre) en usage dans le Nouveau Testamentfont presque toujours référence aux institutions de l’Ancien Testament. Dans les récits de la Passion(Mc 14—15//), ce sont les grands prêtres (c.-à-d. le grand prêtre en fonction, ses prédécesseurs encore en vie le cas échéant et les représentants des principales familles sacerdotales parmi lesquelles devaient être désignés ses successeurs, Mc 8.31n; cf. les anciens des prêtres en 2R 19.1ss; Jr 19.1ss) qui sont désignés comme les principaux responsables de la mort de Jésus (Jn 11.47ss; voir sadducéens*). En dehors de ces récits — et des scènes de persécution qui leur font écho dans les Actes des Apôtres, cf. chap. 4 et 5 — les mentions des prêtres sont rares (Lc 10.29ss). Cependant le livre des Actes dit que les prêtres étaient nombreux dans la communauté chrétienne primitive (Ac 6.7n).

 

L'épître aux Hébreux (3.1; 5.1ss) met en valeur le sacerdoce en présentant Jésus-Christ, qui n’appartenait pas à la caste sacerdotale, comme le grand prêtre par excellence, un grand prêtre sans tache offrant une fois pour toutes un sacrifice parfait. La Première de Pierre (2.5,9) et surtout l'Apocalypse de Jean (1.6; 5.10; 20.6) décrivent l’ensemble des chrétiens(ou plus spécifiquement les martyrs, pour ce qui est de l’Apocalypse) comme des prêtres, dans la ligne de la promesse faite à Israël en Ex 19.5s. (Sur le titre de « prêtre » donné plus tard aux ministres du culte dans plusieurs confessions chrétiennes, voir ancien*.)

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