j.

juif, juive, judaïsme

Le mot juiftient sa forme de l’ancien français juieu, jueuou juiu (au féminin juiue, d’où juive, puis juif au masculin). Il nous vient de l’hébreu yehoudi (pluriel yehoudim) par l’intermédiaire de l’araméen yehoudaï,du grec ioudaïos et du latin iudaeus oujudaeus.

 

Le mot yehoudi(m)apparaît 76 fois dans l’Ancien Testament. L’étymologie intuitive le rattache au nom de Juda, l’ancêtre qui donne son nom à la tribu(Gn 29.35; 49.8s; cf. 1Ch 4.18), puis au territoirequi a été dévolu à cette dernière au temps de la conquête (Jos 15). Certains spécialistes privilégient l’explication géographique, où Yehouda désignerait la contrée « ravinée » (un sens possible du mot, d’après un rapprochement avec l’arabe) s’étendant, au sud de Jérusalem, depuis Beth-Léhem jusqu’à Hébron. Quoi qu’il en soit de son origine précise, le mot yehoudimdésignait d’abord les habitants de ce territoire de Juda. La reconnaissance politique de cette entité est devenue effective à partir de l’onction* royale accordée à Davidcomme roi sur la maison de Juda(2S 5.2-4).

 

Après le schisme de Jéroboam, le nom yehoudi(m), traduit dans la présente version par judéen(s) (aussi pour bené Yehouda, litt. « fils* de Juda », en 2S 21.2; Jr 7.30; 32.30; 50.4,33; Os 2.2; Dn 1.6; Esd 3.9n; Né 13.16), s’applique à tous les habitants du royaume de Juda (ou royaume du Sud), quels que soient leurs clans d’origine (2R 16.6; 25.25; Jr 32.12; 34.9; 38.19; 40.11s; 41.3; 43.9; 44.1; 52.28ss). Après la chute de Samarie(2R 17) et la disparition de l’Israël du Nord, le pays de Juda devint une terre d’accueil et dès lors le nom de Yehoudimrecouvre aussi bien les anciens ressortissants du royaume d’Israël que ceux de Juda. La tendance se confirmera après l’exilà Babylone et le retour de captivité (VIes. av. J.-C.). A partir de là le même mot désigne les ressortissants de la province perse de Transeuphratène associés de près ou de loin à Jérusalem, indépendamment de leur tribu ou de leur région d’origine dans l’ancien royaume d’Israël. Il s’applique plus particulièrement à ceux qui sont revenus d’exil pour reconstruire le temple et la ville (Né 1.2; 2.16; 4.6), mais aussi à leurs compatriotes qui vivent dans d’autres régions de l’empire perse (Est 2.5n; 3.4; 5.13). L’hébreu qu’ils parlent — d’ailleurs de moins en moins après l’exil — est nommé par un terme dérivé, qu’on peut traduire aussi bien par le judéen que par la langue juive (2R 18.26ss// ; Né 13.24).

 

La période hellénistiqueest particulièrement connue par 1 et 2 Maccabées*, qui emploient le mot Juif(s) plus d’une centaine de fois. A cette époque le terme Juif(s), tant pour les Juifs que pour les non-Juifs, représente:

 

- un peuple ou une nation: lorsque, vers 160 av. J.-C., les délégués de Judas Maccabée se présentent au Sénat, à Rome, pour y négocier la reconnaissance diplomatique de l’Etat juif, ils s’expriment en ces termes: « Judas Maccabée, ses frères et le peuple juif nous ont envoyés vers vous... » (1 Maccabées8.20). Lorsque les Spartiates, en réponse à une démarche similaire, rédigent le texte de leur agrément, ils le font en ces termes: « Les magistrats et la ville de Sparte à Simon, grand prêtre, et aux anciens, aux prêtres, et au reste du peuple des Juifs, leurs frères, salut. » (1 Maccabées14.20.) Une lettre émanant du roi Antiochos VII est adressée (vers 130 av. J.-C.) à « Simon, grand prêtre, ethnarque, et à la nation des Juifs » (1 Maccabées15.2).

- un territoire: Un texte raconte comment Jonathan Maccabée accepta d’opérer la restitution des prisonniers capturés « au pays de Juda ».

 

L’expansion de la diaspora(voir « La diaspora ou les Juifs hors de leur pays », p. {0000Xdiaspora}) répandra dans le monde entier un sens aussi englobant — mais moins politique — du mot: celui-ci évoque à la fois un peupleet sa religion. Depuis les confins de la Perse jusqu’à l’Espagne romaine et sans oublier l’Egypte, le nom de Juif en est venu à désigner une importante fraction de la population. Certains estiment que dans l’Empire romain, à l’époque de Jésus et de Paul, un habitant sur douze était juif. Et le statut de cette population, que l’autorité romaine regardait le plus souvent avec une bienveillance notable, pouvait être considéré comme enviable par de nombreuses autres ethnies de l’Empire.

 

Dans le Nouveau Testament, les références aux Juifs sont multiples et différenciées; du point de vue religieux, elles reflètent pour une large part l’étonnante diversité du judaïsme au Iersiècle (voir pharisiens*, Qumrân*, sadducéens*, Samaritains*, zélotes*; voir aussi « Les écoles ou courants principaux du judaïsme au Iersiècle apr. J.-C. », p. {0000Xecoles}).

 

L’affirmation fondamentale des épîtres pauliniennes, qui sont sans doute les tout premiers écrits du Nouveau Testament, c’est qu’il n’y a plus « ni Juif ni Grec » (Rm 1.14n,16; 2.9s; 10.12; 1Co 12.13; Ga 3.28; cf. Ep 2.14ss; Col 3.11). Les références à la vraie circoncision*, qui n’a plus rien à voir avec l’appartenance ethnique mais symbolise l’intériorité de la conviction par opposition au rite concret qui caractérise le judaïsme, vont dans le même sens (Rm 2.29; cf. Ga 6.16n). Cependant la situation d’Israël est toujours privilégiée: primauté d’honneur et de responsabilité ; la fierté d’être juif habite pleinement Paul (Rm 11.1; 2Co 11.22; Ph 3.5). Le développement sur l’olivier porte-greffe (Rm 11.24) met en valeur la judaïté et la position inaliénable du peuple juif dans le plan de Dieu. Mais la polémique est fréquente. Ainsi, le passage véhément de 1Th 2.14s s’explique sans doute en grande partie en fonction d’une querelle de légitimité vis-à-vis du droit romain, les Juifs chrétiens trouvant tout naturel de continuer à bénéficier des protections et privilèges que l’Etat romain avait dévolus aux Juifs de l’Empire.

 

Le terme Juifs est très peu usité dans les évangiles synoptiques*. Il apparaît surtout dans le titre de roi des Juifsattribué à Jésus (Mt 2.2; 27.11,29,37; Mc 15.2,9,12,18; Lc 23.3,37s; aussi en Jn 18.33,39). Quelquefois l’aspect religieux prédomine (Mc 7.3; voir aussi Mt 28.15). En revanche, l’Evangile selon Jeanemploie à maintes reprises l’expression les Juifs, dans un sens fréquemment polémique (voir cependant les emplois plutôt positifs de 4.22; 11.19,31,33,36,45s; 12.9,11). Il va de soi, en tout cas, que les emplois polémiques reflètent un conflit de nature religieuse et non ethnique: l’expression les Juifs désigne, dans les récits, les autorités religieuses de Jérusalem, même quand elles sont opposées à d’autres Juifs (9.22); les Juifs en 18.12 ne sont autres que les grands prêtres et les pharisiens du v. 3 (voir les introductions au Nouveau Testament et à l’Evangile selon Jean).

 

C’est dans le récit missionnaire des Actes des Apôtresque le mot Juif(s) revient le plus souvent. Cet ouvrage ne manque pas de souligner l’importance du tissu sociologique juif qui a favorisé la diffusion de l’Evangile dans le monde (Ac 2.9s). Le réseau des synagogues de la diasporaconstitue le point d’appui naturel de l’action de Paul. Reconnu lui-même comme un Juif authentique, l’apôtre recueille dans un premier temps l’attention favorable de beaucoup de ses compatriotes (14.1,19 ; 17.10,17; 18.2,4,19 ; 19.10,14,17 ; 21.20). La réaction conservatrice de tout ou partie de ces derniers ne tarde cependant pas à se manifester. A deux reprises seulement, ces opposants juifs sont qualifiés de réfractaires (14.2n; 19.9). La plupart du temps, l’auteur développe, en même temps qu’un plaidoyer en faveur de Paul, une sorte d’apologie visant à convaincre les lecteurs juifs ultérieurs que leur réticence originelle ne les exclut pas de la foi chrétienne, celle que les premiers chrétiens, eux-mêmes juifs, ont saluée comme l’accomplissement de la foi authentique d’Israël. Il souligne en même temps que l’attrait exercé par le judaïsme de cette époque sur le monde non juif a naturellement bénéficié au christianisme naissant qui était regardé du dehors — et à juste titre, au moins dans un premier temps — comme une forme du judaïsme.

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