e.

expiation

Les mots expiationet expiercorrespondent traditionnellement, dans l’Ancien Testament, à divers termes hébreux de la racine kpr (p. ex. yom ha-kippourimpour jour de l’Expiationou « jour des expiations », Lv 23.27s; cf. chap. 16 ; voir v. 6n) et, dans le Nouveau Testament, à la famille du verbe hilaskomaï.

 

En ce qui concerne l’Ancien Testament, on n’est pas sûr qu’une image précise soit évoquée par la racine kpr; on y a longtemps vu l’idée de couvrirle péché (cf. Ps 85.3 ; Né 3.37); mais on pourrait aussi bien songer à l’effacementd’une tache, d’une souillure rituelle ou morale (Gn 32.21n; Jr 18.23; cf. Es 43.25; 44.22 ; Ps 51.3,11). Le vocabulaire de l’expiationest, de fait, très proche de celui de la purification* d’une part, du rituel consistant à ôter le péché*d’autre part (cf. Lv 14.49,52s). Par ailleurs, un substantif de la même famille (kopher) signifie approximativement rançonou indemnisation (Ex 21.30n; Es 43.3; Pr 6.35; 13.8 etc.; parfois péjorativement, au sens de « pot-de-vin », cf. 1S 12.3n; Am 5.12n; Jb 36.18n). Dans certains textes, il désigne ce qui permet à quelqu’un d’échapper à la colère divine, de subsister alors qu’en vertu d’une règle rituelle ou morale il devrait mourir (cf. Ex 30.12,15s; Nb 3.46ss; 18.15s; 35.31ss; cf. Ps 49.8; Jb 33.24). On notera, dans des contextes différents, l’emploi du même verbe au sens d’annuler (Es 28.18) ou de conjurer (Es 47.11).

 

Le terme français propitiationa aussi été employé pour kpr; on le retrouve encore, dans beaucoup de Bibles, avec le mot propitiatoire(en hébreu kapporeth) désignant la partie supérieure du coffre sacré ou arche de l’alliance. Certains comprennent kapporeth concrètement, au sens de « couvercle » (recouvrant le coffre sacré comme le sang de la victime sacrificielle « couvrirait » le péché). Mais il est plus probable que l’objet soit ainsi nommé par renvoi direct au sens religieux de kpr:le propitiatoire ou expiatoire(option de la présente traduction) est simplement le lieu où se fait l’expiation. En fait, la notion de propitiationne convient guère à kpr, du moins si l’on entend ce mot dans son sens étymologique d’opération visant à rendre la divinité propice, et en particulier à l’apaiser lorsqu’elle est en colère. Cette idée correspond bien à d’autres expressions bibliques (cf. « [chercher à] apaiser le Seigneur », litt. « caresser la face de YHWH »; cf. Ex 32.11; 1S 13.12), mais Dieu n’est jamais l’objet du verbe kpr. Il peut au contraire en être le sujet (cf. Dt 21.8; Jr 18.23; Ez 16.63; Ps 65.4; 78.38; 79.9; 2Ch 30.18), auquel cas faire l’expiation pourquelqu’un ne signifie peut-être plus grand-chose d’autre que lui pardonnerou l’absoudre.

 

Contrairement au sens courant du mot « expier » aujourd’hui, kpr ne suggère pas immédiatement la souffrance. Certes, dans de nombreux textes, il est associé à la mort(Nb 25.11ss; 2S 21.3ss). En particulier, là où il est question de sacrifices, il présuppose le plus souvent la mort d’un animal. Toutefois, même là kpr n’est pas employé pour la mise à mort proprement dite, mais pour l’acteou le geste rituelqui lui fait suite. Ainsi, dans les textes rituels faire l’expiation pourquelqu’un signifie souvent, selon toute vraisemblance, « accomplir le rite (ou le geste) de pardon (ou d’absolution) sur » lui (Lv 4.20 etc.). Dans beaucoup de textes, et surtout dans le cadre du sacrifice pour le péché,c’est le sang* de la victime qui est associé en priorité à l’idée d’expiation (cf. Lv 17.11). Mais on parle aussi d’expiation en rapport avec des sacrifices non sanglants (Lv 5.11,13).

 

De fait, un examen de l’ensemble des emplois de la racine kpr dans la Bible révèle une étonnante diversité. Ainsi est-il question d’expiation dans des contextes où le rapport à une faute n’est à tout le moins pas évident: par exemple pour les cas de « lèpre », même concernant des objets (cf. Lv 14.31,53; 16.20,33; Ez 43.20,26; 45.15,17,20). En outre, le même terme hébreu peut décrire la résolution d’un conflitentre humains (Gn 32.21n; Pr 16.14). Enfin, la procédure d’expiationeffectuée sous la menace de la colère de Dieu semble parfois indépendante de tout sacrifice (Ex 32.30; Nb 17.11s; Es 6.7). A titre de synthèse, on pourrait suggérer que la racine kpr oscille entre un sens restreint d’annulationdes péchés ou de l’impureté rituelle et un sens plus large d’acte de transitionpositive (les passages de l’impureté à la pureté, de la culpabilité à l’absolution, du conflit à la paix, de la menace à la sécurité n’en seraient dès lors que des cas particuliers). Mais il est peut-être vain de chercher à regrouper des emplois aussi divers sous une seule notion englobante.

 

L’étymologie du verbe grec hilaskomaï et des termes apparentés évoque plus naturellement l’idée de propitiation, d’apaisement de la divinité, telle que nous l’avons définie plus haut. Peut-être cette idée n’est-elle pas absente de certains textes du Nouveau Testament qui utilisent ce vocabulaire (p. ex. si l’on considère que Rm 3.25 oppose l’expiation-propitiation à la colère de Dieu évoquée depuis 1.18). Mais comme LXX emploie régulièrement les mêmes termes pour rendre les dérivés de la racine hébraïque kpr, il y a de bonnes raisons de penser qu’on a affaire, dans le Nouveau Testament, à des notions d’expiation proches de celles de l’Ancien Testament. La différence du Nouveau Testament n’en ressort que davantage: pour ceux de ses auteurs qui font appel à cette idée, ce n’est plus dans un rite religieux répétitif que se joue l’expiation. Celle-ci est plutôt signifiée une fois pour toutes et « pour [les péchés] du monde entier » par la mort de Jésus-Christ(cf. Hé 2.17; 1Jn 2.2; 4.10).

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